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Les
Helvii ou Helviens |
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Histoire
du département de l'Ardèche
Parmi les anciennes peuplades celtiques, celle des Helvii, ou Helviens, n'était
ni la moins puissante ni la moins renommée. Au temps des Tarquins,
ils portèrent, sous la conduite de Brennus, la terreur jusque dans
Rome et finirent par s'en emparer. Plus tard, ils prirent part aux guerres
des Allobroges et des Arvernes contre les Romains. On voyait encore au XIXe
siècle à Désaignes les ruines d'un temple de Diane, qui
paraît être un des deux temples élevés par Quintus
Fabius Maximus en souvenir de sa victoire sur Bituitus, chef des Arvernes.
Cependant
les Helviens ne furent assujettis à aucun tribut. Protégés
par le Rhône et leurs montagnes, ils occupaient le territoire dont le
département de l'Ardèche a été formé. Ils
avaient pour cité Alba, aujourd'hui Aps ; mais, s'ils échappèrent
au joug romain, ils ne surent pas se préserver des pièges de cette
politique habile et prévoyante qui préludait à la conquête
par des alliances, et, quand César parut dans les Gaules, il trouva dans
les Helviens des auxiliaires.
C'est
ainsi qu'ils s'unirent au conquérant marchant contre Vercingétorix.
Ce fut à travers leur pays que le général romain conduisit
son armée jusqu'aux frontières des Arvernes. Rome, pour prix de
leur fidélité, leur accorda le droit latin. Compris sous Auguste
dans la Gaule Narbonnaise, régis par des chefs qu'ils élisaient
eux-mêmes, ils conservèrent leurs libertés et leurs lois.
Alba, leur cité, joignit à son nom celui d'Augusta et devint une
colonie florissante. Il y avait un temple de Jupiter et un collège de
flamines. Une double vole romaine reliait l'Helvie au pays des Arvernes et à
celui des Vellaviens. On en peut suivre encore les traces ; elle est comme dans
le Vivarais sous le nom de chemin de César, la tradition voulant que
ce soit par là que César ait passé pour pénétrer
dans l'Arvernie.
Vers
l'an 200, saint Janvier vint prêcher l'Évangile dans l'Helvie ;
il y fonda l'église d'Alba Augusta ; mais cette ville ayant été
plus tard détruite par les Vandales, Viviers devint le siège épiscopal
et la capitale de l'Helvie, qui ne tarda pas à prendre le nom de Vivarais
(Vivariensis pagus).
Après
la conquête des Gaules par les Francs et les Burgondes, ce pays fit partie
du royaume de Bourgogne ; mais il en fut détaché, en 924, pour
passer le bas Vivarais, aux comtes de Toulouse, et le haut Vivarais aux comtes
de Viennois et de Valentinois, Dans la -suite, à la faveur des guerres
féodales, les évêques de Viviers, déjà riches
et puissants, cherchèrent à s'en emparer. C'était le temps
où, sous prétexte d'hérésie, l'Église déposait
les princes et confisquait leurs biens à son profit. Raymond VI, comte
de Toulouse, venait d'être excommunié et dépossédé
par le pape Innocent III comme fauteur de l'hérésie albigeoise,
et, dans le partage qui fut fait de ses États, l'évêque
de Viviers, alors Bernon de Brabant, ne s'oublia point ; il s'adjugea par provision
le pays de Largentière et les riches mines qui en dépendaient.
A
la mort de Raymond VI, son fils et successeur Raymond VII essaya, mais en vain,
de faire rentrer Largentière sous ses lois ; la spoliation était
consommée (1215). Cependant, quoique souverain de fait du Vivarais, l'évêque
de Viviers reconnaissait la suzeraineté des rois d'Arles et de la Bourgogne
transjurane et des empereurs qui leur succédèrent. Prélat
et prince de l'empire, il avait de grands privilèges ; mais les rois
de France, jaloux d'étendre leur domination, travaillèrent à
rendre ce pays dépendant de leur couronne. Philippe le Hardi, en 1271,
réunit à son domaine le bas Vivarais. Philippe le Bel, en 1308,
et plus tard Charles V achevèrent l'œuvre de leur prédécesseur,
et tout le pays rentra sous l'administration d'un bailli royal du Vivarais et
du Valentinois. A la vérité, les évêques de Viviers
conservèrent le titre de comtes et de seigneurs de Viviers et de Largentière
; mais, au lieu de princes de l'empire, ils durent se résigner à
n'être plus que princes de Donzère, un humble bourg qu'ils possédaient
de l'autre côté du Rhône, dans le bas Dauphiné.
Cependant,
à travers ses vicissitudes, le Vivarais avait su rester indépendant.
Cet amour de la liberté, qui avait caractérisé leurs ancêtres
et que Rome elle-même respecta, les montagnards helviens n'en avaient
rien perdu durant les longues agitations qui suivirent la conquête, et
le même esprit qui leur rit, sous les Romains, conserver leurs coutumes
les porta sous le pouvoir royal à s'associer pour défendre leurs
franchises.
De
là l'origine des états particuliers du Vivarais, origine antérieure
à l'établissement des états généraux du Languedoc.
Deux ordres seulement les composaient, la noblesse et le tiers. L'évêque
de Viviers y avait entrée comme baron, non en sa qualité d'évêque.
Deux barons diocésains, ceux de Pradelles et de Lagorce, et les douze
barons du Vivarais, ceux de Crussol, de Montlaur, de Lavoulte, de Tournon, de
Largentière, de Boulogne, de Joyeuse, de Glialençon et La Tourrette,
de Saint-Remèze, d'Annonay, d'Aubenas et de Vogué, y représentaient
l'ordre de la noblesse ; treize consuls ou députés des villes
et communautés composaient le tiers état. Les barons siégeaient
alternativement et par tour aux états généraux du Languedoc
; mais ils n'assistaient pas toujours en personne aux états du Vivarais
; chacun d'eux y était représenté par un bailli.
Aucune preuve de noblesse n'était exigée ni pour les baillis ni
pour les représentants. Ces états étaient présidés
par le baron qui avait assisté dans l'année aux états généraux
du Languedoc. Il n'y avait rien de fixe pour le lieu où devaient siéger
les états ; le baron président ou son bailli subrogé les
convoquait où bon lui semblait, et même dans sa propre maison.
Comme seigneur de Viviers, l'évêque envoyait son bailli aux états.
Celui-ci, qui était ordinairement un des vicaires généraux,
y prenait rang et séance avant les baillis des barons. Le sénéchal
du Vivarais ou son lieutenant et le premier consul de Viviers avaient entrée
aux états en qualité de commissaires ordinaires. Telle était
l'organisation des états du Vivarais, les seuls du royaume où
l'ordre du clergé n'avait point de représentants.
A
quelle époque eut lieu l'union de ces états à ceux du Languedoc
? C'est ce que rien ne nous apprend. Sans doute, le besoin de concerter des
mesures générales pour arrêter les incursions des Anglais
ou pour apaiser les troubles qui agitaient le pays dut contribuer à cette
union, qui, d'abord accidentelle et dépendante de circonstances majeures,
ne finit par s'opérer régulièrement que lorsque Charles
VIII eut donné aux états généraux la forme stable
qu'ils n'avaient pas avant son règne.
Après
la bataille de Brignais (1361), si fatale aux maisons de Bourbon et du Forez,
les tard-venus se ruèrent sur le Vivarais et le mirent à contribution.
Ces bandits faisaient profession de tout piller et saccager dans les endroits
où ils arrivaient, de violer femmes , filles et religieuses et de rançonner
toutes sortes d'hommes, nobles et paysans. Ils n'étaient d'aucune religion
; mais ils assistaient les hérétiques pour avoir sujet de voler
les clercs, les prêtres et les églises.
Plus
tard, sous Charles VII, les routiers reparurent dans le Vivarais. Rodrigo de
Villandras, un de leurs chefs, noble aragonais que Jean Ier, duc de Bourbon,
avait jugé digne de devenir l'époux de l'une de ses bâtardes,
s'était adjugé par droit de conquête, outre le Velay et
le Gévaudan, le Vivarais et avait fait d'Annonay sa capitale et sa place
d'armes. Heureusement, il n'y séjourna pas longtemps, et, le 24 mai 1430,
le Vivarais vit s'éloigner pour toujours ces bandes de pillards.
A
ces temps orageux succéda pour les habitants du Vivarais un siècle
de tranquillité ; mais ils devaient l'expier chèrement. Naturellement
portés à tendre la main à tout ce qui est proscrit ou qui
leur rappelle leur antique liberté, ces fiers montagnards avaient pris
parti pour les Albigeois. Après la sanglante expédition de Montfort,
ils en sauvèrent plus d'un de la fureur des catholiques. Comment le cri
du moine saxon n'eût-il pas eu de l'écho dans ce pays ? C'est en
1528 que la Réforme y fut prêchée pour la première
fois à Annonay, d'où elle ne tarda pas à se répandre
dans les autres villes du Vivarais. Désaignes, Privas, Le Pouzin, Andance,
Le Cheylard, Viviers, Saint-Agrève, Vallon se prononcèrent pour
la nouvelle doctrine. Partout les religionnaires, rappelant le zèle des
premiers chrétiens contre les idoles, se jetaient sur les couvents ou
sur les églises, renversant les croix et les autels, brisant les images
et foulant aux pieds les vases sacrés. Ces excès en appelèrent
d'autres, et les catholiques usèrent de représailles.
Alors
commença, en 1560, cette guerre qui pendant cinquante-huit ans ensanglanta
le Vivarais. Saint-Chamond, le terrible chef catholique, était seigneur
d'Andance. Ses vassaux, las de ses vexations et de ses tyrannies, secouèrent
le joug et se livrèrent aux protestants. Aussitôt Saint-Chamond,
qui guerroyait dans le Forez, accourt et assiège la ville. Trop faibles
pour résister, les habitants se rendent ; mais, pour les punir de leur
félonie, Saint-Chamond les chasse de leur ville et les condamne à
ne jamais plus y rentrer. Cela fait, il marche contre Annonay, s'en empare et
y met tout à feu et à sang.
Tels
furent les excès des catholiques dans ce pays, qu'au XVIIe siècle
ils n'y avaient déjà plus l'avantage du nombre. Partout les protestants
y dominaient. Privas, Le Pouzin et la plupart des autres villes résistaient
encore. Chargé de faire rentrer le Vivarais dans le devoir, le due de
Montmorency vint mettre le siège devant cette dernière ville (1628).
Après une vive résistance, elle se soumit ; mais ses murs et son
château furent rasés. Déjà Le Cheylard avait subi
le même sort. Saint-Agrève n'était plus qu'un monceau de
cendres. Annonay, deux fois pillée et saccagée, respirait à
peine. Bientôt Privas assiégé par Louis XIII devint aussi
la proie des flammes. Ses habitants furent dispersés, et pendant longtemps
la main royale s'appesantit sur cette ville comme sur un lieu maudit.
Après
la révocation de l'édit de Nantes, l'insurrection des camisards
dans les Cévennes agita le haut Vivarais ; mais on y envoya des garnisaires
pour empêcher le mouvement de se propager. C'est ainsi que ce malheureux
pays, à peine remis de ses désastres pendant les guerres du XVIe
siècle, eut encore à subir les dragonnades. Depuis la Révolution
de 1789, nous n'avons plus rien à signaler d'important dans l'histoire
du département de l'Ardèche ; ses laborieux habitants se sont
appliqués à vaincre la nature de leur sol souvent ingrat, et ils
ont trouvé dans l'agriculture, dans l'industrie et le commerce, une prospérité
croissante et méritée.
Alba-la-Romaine,
Terre d'Audace,
La
voie Romaine des Helviens, Patromoine
d"Ardèche, Oppidum
de Jastre, Les
Celtes
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